Étienne Chouard en interview

Étienne Chouard : Dissident ou Visionnaire de la Démocratie ?

Il y a des noms qui, lorsqu’ils sont prononcés dans le débat public, provoquent immédiatement des froncements de sourcils et des silences gênés. Étienne Chouard fait partie de ces personnages devenus, presque malgré eux, des figures sulfureuses du paysage intellectuel français. Coupable d’avoir trop réfléchi sur la démocratie, et surtout d’avoir voulu en parler avec tout le monde, il s’est attiré les foudres du camp du Bien, celui qui décide de qui a le droit d’être entendu et qui doit être relégué aux marges. Pourtant, ses idées méritent qu’on s’y attarde, ne serait-ce que pour comprendre pourquoi elles dérangent tant.

Parcours et influences

Ancien professeur d’économie-gestion, Étienne Chouard émerge sur la scène publique en 2005, lorsqu’il publie sur son blog une analyse détaillée du traité établissant une Constitution pour l’Europe. Son texte, partagé massivement, contribue à nourrir le camp du « non », qui finira par l’emporter lors du référendum. Il devient alors une voix influente dans les milieux critiques de l’Union européenne et du système représentatif en général.

Depuis, Chouard n’a cessé d’explorer les rouages de ce qu’il considère comme une imposture démocratique. Son combat : démontrer que l’élection, loin d’être l’outil suprême de la souveraineté populaire, est en réalité un instrument de confiscation du pouvoir par une élite. Il s’inspire notamment d’auteurs comme Cornelius Castoriadis et des expériences de démocratie directe, en particulier l’Athènes antique et certaines pratiques suisses contemporaines.

Une critique radicale de la démocratie représentative

Pour Chouard, notre système politique actuel ne mérite même pas le nom de « démocratie« . Il parle plutôt d’un « système oligarchique à masque démocratique ». Les élus, une fois en poste, deviennent une caste protégée de toute remise en cause populaire, guidée par ses propres intérêts plutôt que par la volonté générale. Selon lui, le suffrage universel, tel qu’il est pratiqué aujourd’hui, n’est qu’un leurre destiné à donner l’illusion du choix aux citoyens tout en maintenant le véritable pouvoir entre les mains d’une minorité.

Illustration d'une assemblée parlementaire où les politiciens sont manipulés par des fils comme des marionnettes, symbolisant la mainmise invisible sur le pouvoir.

Ses propositions : vers une démocratie véritablement citoyenne ?

Si l’élection est un piège, quelle alternative ? Chouard défend avec ferveur l’idée du tirage au sort des représentants, une pratique déjà expérimentée à certaines périodes de l’histoire. Il voit dans cette méthode un moyen de réintroduire une véritable égalité politique et d’éviter la professionnalisation du pouvoir. Autre cheval de bataille : le référendum d’initiative citoyenne (RIC), qui permettrait aux citoyens d’imposer des décisions sans passer par l’intermédiaire des élus. Il milite également pour l’organisation d’assemblées constituantes populaires, censées redéfinir les règles du jeu démocratique.

Représentation symbolique du tirage au sort politique : des citoyens anonymes sont choisis dans une urne tandis qu’en arrière-plan, des élus professionnels assistent à la scène, passifs.

Polémiques et ostracisation médiatique

Mais voilà, parler de démocratie avec tout le monde, y compris avec des figures sulfureuses, ça ne pardonne pas. Chouard a été violemment attaqué pour avoir accepté de débattre avec des personnalités comme Alain Soral ou pour ses hésitations face à des questions sensibles comme l’existence des chambres à gaz (maladresse qu’il a lui-même regrettée). Résultat : bannissement des grands médias, réputation entachée, et réduction au silence d’un intellectuel dont les propositions auraient pourtant mérité d’être discutées au lieu d’être caricaturées.

Un homme seul face à un mur imposant couvert de logos de grands médias, illustrant l’ostracisation et le silence imposé dans l’espace public.

Démocratie Confisquée : La Critique Radicale d’Étienne Chouard

Faut-il être d’accord avec Étienne Chouard ? Pas nécessairement. Mais faut-il le réduire à un paria pour autant ? La démocratie suppose le débat, même avec ceux qui dérangent. Le traitement qui lui a été réservé en dit peut-être plus long sur l’état du débat public en France que sur Chouard lui-même. Et si sa mise à l’écart prouve une chose, c’est peut-être que ses critiques du système représentatif ne sont pas si absurdes que ça.

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